Il n’a pas plu sur la parade, qui, telle que chaque année, était réglée comme du papier à musique. Un seul bémol a cependant rajouté à l’émotion de l’instant : c’était la dernière du Grand-Duc Henri en tant que souverain.
Un vent à soulever les jupes et à ébouriffer les chignons des invitées ainsi qu’à porter haut les drapeaux aux couleurs du Luxembourg soufflait sur l’avenue de la Liberté, hier midi, lors de la parade. La porte-drapeau de la police grand-ducale luttait, les deux pieds bien ancrés au sol, pour maintenir le Roude Léiw prêt à jouer les filles de l’air lors de l’inspection des deux corps.
Heureusement, militaires et policiers portaient leurs képis et calots bien vissés sur la tête. Le Grand-Duc Henri également dont c’était la der des ders. L’année prochaine, son fils Guillaume prendra la relève du passage en revue des troupes et du salut aux drapeaux.
«Présentez… armes!» Les chefs de corps s’époumonent pour que leurs commandements ne s’évaporent pas dans l’air. Et c’est avec ferveur que policiers et soldats rangés le long de l’artère ont comme un seul homme scandé le triple «Vive» sur invitation du colonel Alain Schoeben. Année après année, la même procédure, le même ordre à quelques variations près. Les sapeurs-pompiers restent les favoris du public à l’applaudimètre.

(Photo : Georges Noesen)
Malgré les rafales, survol aérien d’un A400M, d’un A330 MRRT et d’un hélicoptère H145M, démonstration de l’unité de déminage, divers détachements de l’armée de terre et de la police, canon offert au Grand-Duc Jean par les Irish Guards, véhicules de combat… Vient ensuite la partie non militaire du défilé du 23 juin : les douanes, les sapeurs-pompiers, l’administration pénitentiaire, la Croix-Rouge et les aubades. Après les muscles et la rigueur, la force du cœur et l’honneur ainsi que la tradition des airs populaires joués par l’Union Grand-Duc Adolphe.
Pas de pluie sur la parade
Dans le public massé de part et d’autre de l’avenue sur les trottoirs et aux premières loges des balcons et fenêtres des immeubles environnants, on a sorti les drapeaux. «Ça amuse les enfants», note Claude, accompagné de Gabriel, 4 ans, qui est ébloui par «les motos de la police et les gros camions».
Sa sœur, Lily, 6 ans, demande si après le défilé elle pourra «aller caresser les chiens de la police et des pompiers». La petite est fascinée. «Papa, tu crois que notre Vanille pourra devenir un chien policier un jour?» Pas sûr que les forces de l’ordre engagent des bichons un jour!
Pierre, un sexagénaire, s’amuse de voir défiler des ancêtres de la police. «Je me souviens de ces camionnettes et des vieilles Audi Quattro. Les policiers les utilisaient dans les années 1990. C’était au siècle dernier, le Luxembourg a bien changé depuis et ses citoyens également.»

(Photo : Georges Noesen)
Dirk vient de s’installer au Luxembourg. «C’est ma première fête nationale dans mon nouveau pays. Chez moi, au Danemark, il y a aussi une monarchie très appréciée du peuple. Je voulais expérimenter les festivités et connaître la ferveur des Luxembourgeois. C’est sympa! Ça complète ma vision», explique le nouvel arrivant. Jacqueline est frigorifiée. Elle bat la mesure de Zu Arel op der Knippchen.
«J’attends de pouvoir aller chercher une assiette d’Ierbsebulli offerte pour l’armée pour me réchauffer», se réjouir la septuagénaire qui «assiste chaque année à la parade et à tous les déplacements de la famille grand-ducale en général.» «Henri va me manquer. Il a une telle prestance et un tel charme. Une génération chasse l’autre. C’est la vie.»
Une heure après le début de cette démonstration de force et d’engagement pour la patrie, Henri, Maria Teresa, Guillaume et Stéphanie ont quitté la tribune officielle sous la grisaille et les hourras de la foule dont une partie convergeait déjà vers la place de Metz où se tenait la fête populaire de l’armée, sorte de vitrine à ciel ouvert de ses véhicules ainsi que de ses activités et de ses diverses missions.
Les enfants qui avaient les yeux qui brillaient lors du défilé ont pu s’asseoir à bord de certains de ces impressionnants véhicules ou découvrir le travail du service de déminage.

(Photo : Georges Noesen)
Sur la place, un orchestre reprenait des standards dansants d’aujourd’hui et d’hier tandis que des soldats en treillis distribuaient de quoi combler les creux et satisfaire les amateurs de Mëttwurscht et de la soupe aux pois nationale.
Fête nationale luxembourgeoise oblige. Après les festivités de ces derniers jours, les Luxembourgeois en ont encore sous le pied. «C’est sympa ici, je suis venu soutenir mon fils qui joue de la grosse caisse dans la musique militaire», confie un papa fier qui a rejoint la capitale à vélo depuis Dippach.
«J’ai demandé à une amie de me prêter un parapluie, mais je n’en ai pas eu besoin finalement.» La pluie ne sera donc pas venue gâcher la parade.